Le cahier d'avril

>les géniaux détournements de Tatsuya Tanaka

Tatsuya Tanaka est un photographe fou et génial qui manie l’humour, l’ironie et la parodie dans son travail a un niveau frôlant le génie.

En 2011 il décide de créer son Miniature Calendar. Dans son travail il interroge notre relation aux objets qui nous entourent en recréant des scènes de la vie quotidienne. Ça pique, c’est plein d’humour, c’est parodique mais c’est surtout une manière tellement intelligente de réinterroger les petits bonheurs, le sens de la vie, de nos existences.

Alors quand il intègre des objets devenus les symboles de notre quotidien sous Covid-19 à ses créations et bien bim, bam, boum. Tous ces objets qui peuplent nos vies depuis un an comme, les masques, thermomètres deviennent alors les témoins de l’impact de la pandémie sur notre quotidien. Le masque n’est plus un masque il est une piscine, un espace de liberté que nous avons perdu, le papier de toilette se transforme en piste de ski (avant la rupture de stock :-)), l’objet devient un symbole de la transformation de nos vies.

Rien n’est gratuit dans ce travail mais tout interroge nos modes de vie et la fragilité de ceux-ci. Au-delà de la beauté et de la créativité de son travail Tatsuya Tanaka nous propose une relecture de notre société et de l’influence des objets dans celle-ci. On ne s’en lasse pas.

pour voir comment Tatsuya Tanaka crée ses univers c’est →ici
son compte insta c’est →
©image Tatsuya Tanaka

>mind the gap

Les campagnes de communication irriguent notre société de mots et d’images, elles la nourrissent quotidiennement. Nous en sommes les auteur·trice·s. Par la force et la multiplicité de ses messages, la communication est un des éléments clé pour transformer les comportements. Le rôle et le poids des normes sociales, des valeurs de référence sont considérables en communication. La manière d’exercer notre profession n’est donc pas neutre, elle a de l’influence sur les mentalités et les clichés. La communication permet de mettre en lumière les grands débats sociétaux, les évolutions de notre société, ce qui l’agite, la fait vibrer.

Nous, les communicant·e·s, savons que nous assumons une responsabilité très forte de par nos métiers et l’influence que nous exerçons dans notre traduction de ce qui anime la société. En tant que porte-paroles des grands débats et préoccupations de notre époque, nous occupons un rôle central qui n’est pas sans conséquence. Nous vivons une période compliquée, nous devons nous réinventer sans cesse, nous sommes nombreu·x·euse·s à courir après les mandats mais néanmoins, nous ne devrions jamais perdre de vue que si nous sommes mandaté·e.s par nos client·e·s c’est aussi pour notre capacité à être un miroir pour elles et par extension la société dans laquelle nous vivons. Et là on pose la grooooosse question; Comment fait-on quand un·e client·e demande une campagne, un produit, un post dont on sait que cela va complètement à l’encontre de ce qui se passe dans la société? On s’autorise cette question sans arrogance aucune car ces derniers mois nous avons vu fleurir un nombre conséquent de posts, de campagnes et de produits bien stéréotypés

A titre d’exemple sur le marketing genré, une célèbre marque de couteau helvétique a sorti un couteau rose avec un rabais spécial le 8 mars dernier, journée des DROITS des femmes. Oui, il s’agit de la journée des DROITS pas de la journée du rose, rabais, conso. Dans le genre faites-le en rose, plus petit, plus cher et ce sera ok pour les femmes on a rarement fait aussi fort (voir les liens de différents exemples en fin d’article).

On se demande comment c’est possible d’ignorer à ce point que les prises de consciences sur ce sujet se multiplient rapidement ? Alors oui la solution ne peut pas être que de notre ressort mais elle devrait aussi être une prise de conscience, en amont, chez nos client·e·s et nos politiques. Certes depuis le 1er janvier 2020, les publicités sexistes sont interdites dans le canton de Vaud mais aller faire un tour sur les liens en bas de l’article pour vous faire une idée de comment cela est appliqué.

A titre d’exemple depuis juin 2019 en Angleterre, l’Autorité des standards de la publicité (ASA) est habilitée à interdire les spots publicitaires qui relaient des stéréotypes sexistes et ça commence à se ressentir dans les campagnes de communication après deux cas d’interdiction retentissants*.

Ayons ce courage au 21ème siècle de conscientiser, de sensibiliser nos client·e·s de manière à ce qu’ils/elles deviennent responsables et porteu·r·se·s des évolutions sociétales qui sont en cours. Mind the gap.

pour voir des exemples en Suisse de marketing genré c’est → en France c’est → ici
*pour comprendre pourquoi les pubs de Philadelphia et VW ont été interdites en Angleterre c’est → ici 

>in Rañute we trust

Vous avez sans doute entendu parler ces derniers mois de Rañute et de sa fondatrice Eléonore Arnaud*. Si ce n’est pas le cas, Rañute c’est la première boutique physique dédiée aux règles en Suisse et plus précisément à Renens. Nous sommes très heureu·x·euse·s de pouvoir accompagner la marque en travaillant sur son identité et sa communication durant ces prochains mois. On a été totalement séduit par le projet unique en son genre et le charisme d’Eléonore qui en plus d’allier un humour certain à des valeurs humaines fait tout cela dans un esprit de partage et bien rock.

C’est le genre d’idée qui semble sorti de nulle part et dès que l’on s’y attarde 30 secondes on comprend immédiatement la pertinence et l’importance de ce qu’Eléonore a mis en place. Promesses d’étincelles, d’humour, de transgression et de glam rock ! On se réjouit de vous montrer tout cela courant mai.

le compte insta de Rañute c’est →
©image Rañute


Le cahier de janvier

>déconstruire la publicité

Dans les publicités des années 50 il était très courant de voir les femmes représentées comme des mères de famille au foyer qui s’occupaient de la maison, de la cuisine, des enfants en attendant toute la journée le retour de l’Homme prodigue. Et tout ça en souriant en plus. Les femmes étaient réduites au rôle d’esclave. Même si les mentalités ont quelque peu évolué depuis, il n’en demeure pas moins que la publicité repose encore sur des stéréotypes et des injonctions à être jeune, musclé·e, mince etc. Et si l’on inversait tout cela? Nous nous sommes intéressés au travail d’Eli Rezkallah et plus précisément à sa série: “In A Parallel Universe”. Dans cette série Eli Rezkallah se réapproprie et revisite des publicités des années 50 en inversant les rôles. Il dit:  « J’ai imaginé un univers parallèle, où les rôles sont inversés et où les hommes goûtent leur propre poison sexiste ». Le résultat est saisissant et interpelle. Ces images fictives font réfléchir sur le rôle de la publicité dans nos sociétés et les idées qu’elle véhicule. Pour le coup, même si les pubs actuelles semblent plus lisses le résultat, quant à lui et plus pervers. Cela est évidemment plus subtil mais tant les injonctions que les stéréotypes sont encore omniprésents. La publicité a un urgent besoin de se remettre en question dans ses codes et ce qu’elle véhicule. Vous ne pensez pas qu’il serait temps de vendre un parfum pour homme sans avoir un apollon super musclé entouré de femmes béates d’admiration ou une femme qui passe l’ aspirateur dans une maison ou une vie parfaite? Dans le fonds quelle est la différence avec les publicités des années 50? Rien à part une bonne dose d’hypocrisie.

#AllezOnSortDesStereotypes

©image Eli Rezkallah

>toi mème

La star incontestée sur les réseaux sociaux lors de nos 2’432  confinements est sans conteste le mème. Bon, il faut dire que passablement de monde a eu passablement de temps.  Combien êtes-vous à attendre impatiemment la fin de la conférence de presse du Conseil fédéral pour voir la nouvelle série de mèmes de Thomas Wiesel ?  Les mèmes de Bernie Sanders sont  devenu planétaires grâce aux internautes. Et forcément quand cela fait le buzz sur les réseaux sociaux, les marques s’en emparent.  Bernie s’en fout complètement mais le photographe Brendan Smialowski qui a fait cette image un peu moins (la dame qui a fait les moufles est ravie);  » Je n’aime pas que le travail d’un journaliste devienne un mème. […] Ce n’est pas à moi de dicter comment les gens consomment ou utilisent le journalisme, mais notre travail ne doit pas être un divertissement « . Alors un mème c’est quoi au fond ? Nina Duque, chargée de cours à l’UQAM, spécialiste des questions entourant la socialisation numérique, constate chez les internautes une envie de s’approprier l’image pour appartenir à un groupe.  » Avec ces mèmes, on veut juste se divertir et rire ensemble, note-t-elle. En partageant notre propre version, on fait réagir les amis, on crée des liens avec des inconnus. Ça nous unit« . Donc un mème c’est un art populaire du détournement qui amène humour et lien. C’est bien mais la différence entre un individu et une marque c’est qu’il n’y pas le même objectif derrière, même si au premier abord, la communication semble similaire ( ben même alors !). Alors certes l’on vit une période du tout gratuit mais le gratuit il se fait toujours au détriment de quelqu’un. C’est pas comme si Amazon, Ikea et les autres ne pouvaient pas s’offrir une image,non?

#MèmePasMalBenSiEnFait

©image toutes les marques, Bernie Sanders et Brendan Smialowski

>balance ta créativité

Les intelligences artificielles vont-elles tuer les créatif·ve·s ? Cette question ne date pas d’hier et elle est même le résultat d’une expérience qui date de 2017. Cette année là l’agence Mc Cann Japon organise une compétition entre une intelligence artificielle et leur directeur de création. L’objectif était de créer un spot publicitaire. Crime de lèse-majesté :-)! Mais dans quel but? Savoir si à terme on pourra remplacer tous les créas de l’agence par des machines. La question elle a pas été vite répondue (clin d’oeil à J-P Fanguin, bisous, bisous) car au final c’était surtout un gros coup de buzz. A ce jour il y a toujours un directeur de créa chez Mc Cann. Aujourd’hui la question se pose différemment. Le danger pour les créatif·ve·s est plus sournois qu’une intelligence artificielle et a pour nom: Logotron, Tailor brand, Templafy, Brand Crowd, Envato, Wix, filtres Instagram…la liste est longue… . On assiste à une standardisation générale de l’esthétique due en grande partie à ces outils. Ces différentes plateformes sont développées sur une base relativement simple. Un minium d’intervention possible pour éviter tout amateurisme mais au final tout professionalisme aussi.  Vous ne pouvez modifier que le stricte nécessaire ce qui fera que le résultat sera peu importe ce que vous faites, potable.  Le paradoxe de ces outils est multiple.  Plus les logos, les images sont faciles à créer, plus elles se ressemblent et moins elles nous interpellent. Ce phénomène de standardisation en vient à gangréner les agences de création. La peur de créer fait place à la standardisation, à l’uniformisation et à une forme d’autocensure chez les créatif·ve·s. Si nous prenons pour exemple les images des logos, nous constatons qu’ils sont tous le fait de plusieurs agences. Et pourtant les travaux accomplis sont tous plus ou moins de même facture. Là la question elle est vite répondue (salut J-P), la standardisation dans l’esthétique mène à une perte d’identité concrète, immédiate et visible. Le danger pour les créatif·ve·s comme pour les marques ce n’est pas l’intelligence artificielle c’est nous même et notre soumission à une esthétique standardisée et sans âme!

#DesignerCestUnVraiMetier

©image Cette page n’est plus disponible & solowork


Le cahier de décembre

>no gender

Harry Styles brise les diktats du genre en couverture de Vogue US du mois de décembre ! Pour la première fois en 127 ans, Vogue US a choisi, pour son numéro de décembre 2020, de mettre en couverture un homme en solo.  Nous voyons émerger de nouveaux codes et de nouveaux genres qui étaient jusqu’à présent très définis. De nouvelles identités flottantes se dessinent entre hommes et femmes. Depuis des décennies les marques pratiquent un marketing genré (choisir de cibler un genre masculin ou féminin). Quel que soit le domaine, les modes de consommation ont été pendant très longtemps binaires : d’un côté les produits pour femme/fille et de l’autre, les produits pour homme/garçon. Choisir de cibler un genre, c’est le définir et prendre le risque de véhiculer des schémas, des clichés et des stéréotypes sociétaux qui seront de plus en plus en contradiction avec les aspirations des consommateur·trice·s. Le passage au marketing non genré n’est pas une tendance éphémère ou un effet de mode il serait dangereux de le percevoir comme cela. Le marketing genré peut être très rebutant pour bien des consommateur·trice·s , particulièrement pour les moins de 30 ans et celleux qui les suivent, alias la génération Z. Ces deux groupes de consommateur·trice·s ( la cible que toutes les marques s’arrachent pusiqu’iels sont les consommateur·trice·s de demain) ont largement prouvé que leurs valeurs ne correspondent en rien au genre. Attention le non genré commence aussi à faire son chemin dans les générations précédentes !

#nogenderitsbetter

©image Vogue

>la force de la fragilité

Art ancestral japonais, le Kirie consiste à découper et à créer une œuvre à partir d’UNE SEULE feuille de papier! Initialement utilisé lors des cérémonies religieuses, cette tradition millénaire est aujourd’hui portée à des sommets par des artistes contemporains qui donnent au papier un nombre quasi infini de formes.  Ces artistes confirment une nouvelle fois la possibilité d’harmoniser la modernité et la tradition au sein de ses rites culturels. Parmi ces artistes, Nahoko Kojima est une magicienne qui nous envoûte, nous ensorcelle !  Au-delà de la noblesse, de la prouesse et de la dextérité, nous avons surtout été fasciné par la poésie qui se dégage de son travail. Elle ne fait pas que de découper une feuille de papier au contraire elle joue avec pour donner vie à un imaginaire aussi fragile que puissant. Nous ne nous lassons pas de contempler ses œuvres d’une poésie infinie, d’une délicatesse absolue, d’une force littéralement extraordinaire.

#laforcedelafragilite

Pour voir le travail de Nahoko Kojima c’est [ ici ]
et là aussi [ ici ]
©image Nahoko Kojima

>un énorme coup de ♥ pour la fondation Mater

En cette année si particulière et difficile, notre dernier cahier de l’année n’a pas pour but ni envie de parler d’une marque, une publicité, une stratégie de com ou un produit mais d’un projet qui est un coup de pour nous. Ce que fait la fondazione mater allie tout ce que nous aimons. Ce projet c’est à la fois de l’inclusion sociale à travers la cuisine,  l’accès à une alimentation équilibrée aux personnes en situation de précarité, une lutte contre le gaspillage alimentaire, de la formation.  Et c’est 100% créatif.  Les repas sont élaborés par des chef·fe·s/brigades bénévoles qui pour certain·e·s se retrouvent dans une situation difficile due à la pandémie.  A la base de ce projet on retrouve le mad créatif chef Walter el Nagar, une vraie personnalité socialement très engagée.  Depuis le premier confinement, plus de 16’000 repas, à base d’invendu ont été servis. Ce projet porte des idéaux et nous montre ce que l’humain peut faire de mieux lorsqu’il s’affranchit de préjugés, lorsqu’il met sa créativité au service d’une idée avec un grand I.

C’est simple, c’est vrai, c’est sûrement bon !

#bigupfondazionemater

La page facbook de la fondation c’est [ ici ]
Le compte insta c’est [ là ]
Le site de la fondazione Mater [ là ]
©image Fondazione Mater


Le cahier de novembre

l'upcycling qui sublime !

les fêlures d'or

Pourquoi nos objets préférés, une fois cassés, devraient-ils quitter nos vies et finir à la poubelle ?  Une cassure est-elle synonyme d’adieu, laissant derrière lui souvenirs ou bons et loyaux services rendus durant de longues années ? Au Japon iels ont dit non et ont développé.e.s depuis 600 ans une technique qui sublime les fêlures.  On est tombé en admiration devant cet upcycling japonais, le kintsugi, littéralement le raccommodage à l’or.  On aime cette attitude qui consiste à saupoudrer les failles et les cassures d’or plutôt qu’à les cacher. Ça paraît tellement évident, élégant, créatif et si simple à la fois: Comme une métaphore de nos existences. A quand l’upcycling horloger?

#onattendjustedecassernotrebolprefere

Pour découvrir le kintsugi c’est [ ici ]
Pour lire un article sur le kintsugi c’est [ là ]

l'écriture inclusive a sa typo !

in font we trust

On est tellement fan du projet de Tristan Bartolini. Un gros big up pour lui ! On entend le débat mais a-t’il lieu d’être quand on essaie simplement d’être plus équitable en écrivant ? Faire avancer l’équité femmes-hommes ça passe par des prises de conscience et des  actes mais aussi par notre façon d’écrire.  L’ère des typographies inclusives et non-binaires ne fait que débuter et c’est tant mieux. Reste que cela ne pourra être qu’un premier pas car l’écriture inclusive telle qu’elle est majoritairement pratiquée actuellement pose un problème d’invisibilisation des personnes non-binaires. Il reste encore du travail pour que l’écriture soit le reflet de notre société mais ça avance et c’est bien !

#helveticainclusiveetqueerceseraittop

Pour lire un article sur le travail de Tristant Bartoli c’est [ ici ]
Pour lire un article sur l’écriture épicène c’est [ là ]
Un petit manuel pour apprendre à écrire en inclusif par [ ici ]
Un petit manuel pour apprendre l’écriture Queer par [ là ]

LA GROOOOSSE COLèRE!

c'est pas celle de Stève Berclaz mais c'est pour ça que le fond est rouge

Ce post pourrait être un concours, celle ou celui qui peut nous expliquer clairement la stratégie de com de l’OFSP durant la 2ᵉ vague gagne un abo à vie pour manger des pâtes tous les vendredis chez nous. En fait c’est un peu de la triche car toi/vous qui avez tout compris n’existe·s·z pas. Franchement en tant que communicant·e·s on n’a jamais rien vu d’aussi chaotique. On l’avoue on est totalement perdu dans ce maelstrom de communication covidienne. Alors oui c’est certain que le COVID 19 c’est absolument inédit, une situation extraordinaire, totalement imprévisible, inconnu, évolutif, grave, c’est clair. Mais malgré l’exceptionnalité de la situation  ça veut pas dire qu’il faut pour autant oublier quelques règles d’or de la communication surtout quand tout ce que tu dis est décortiqué 12 secondes après que tu l’aies dit. Le manque de clarté dans l’information directe fait le lit de toutes les théories et génère de l’incompréhension parmi la population.

#cestlebinzdanslatetedetoutlemondesitespasclair